Documentaire
Lorsque Fred Bondi, juif Viennois, revient à 90 ans à sa ville de naissance après de longues pérégrinations, il peut dire « la boucle est bouclée ». Et se confier en toute sincérité, nous raconter sa vie sans affectation ni prétention. Sa vie devient le paradigme de la fuite et de l’exil ; son récit nous donne à entendre, à demi-mots, par euphémismes successifs, l’enfance heureuse et le bonheur brisé, la violence nazie, l’antisémitisme, la solitude, le souvenir, la perte. Par un hasard de tournage, son visage se trouble lorsqu’il explique le trouble des idées qui l’envahit au lendemain de l’Anschluss, à l’arrivée du pouvoir nazi en Autriche. Témoin et victime, il conserve pour seul viatique l’idée de sa chance. Il dit peu des siens disparus, de ses parents inhumés au loin sur le continent américain, de la perte de nationalité, tardivement réparée, de sa vie sectionnée, de la perte des amis, des habitudes, du pays abandonné, de l’avenir interrompu. Il laisse entrevoir que le nazisme transforma des gens ordinaires en tortionnaires. Sa détestation reste vivace autant que son incompréhension de cette idéologie qui usa de la banalité du mal pour instaurer un système de terreur et de haine. Fred se souvient de la solidarité et de l’entraide dont lui et les siens bénéficièrent. Il ne donne pas de leçon mais nous incite à réfléchir. Son témoignage est une trace dans l’histoire. Remercions-le de nous la montrer.